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Des tréfonds de l’imagination de Balak sort Vermin, une production unique sous tous rapports qui se fait une joie de se moquer du genre qu’elle exploite.



Une production atypique

Vermin est un dessin animé des studios Bobbypills. Pour ceux qui ne connaissent pas ce studio, voilà leur devise : “ Nous sommes un studio d’animation parisien plein de gens dépressifs, beaux et complètement déjantés qui font des cartoons pour des gens dépressifs, beaux et complètement baisés”. On parle donc ici d’un studio très à part produisant des œuvres très à part. Les moyens sont petits mais les ambitions sont grandes pour ce studio dont Vermin était l’une des toutes premières créations. La série est un format court : une saison de 10 épisodes, d’en moyenne 8 minutes chacun.

Screenshot du site web du studio.


La raison principale de l’existence de ce studio est de canaliser la créativité débordante de Balak, le fondateur du studio, qui est présent sur chacun des projets. La patte de Balak se retrouve donc dans tous les projets du studio, leur donnant une sorte d’étrange continuité. Balak est un auteur très à part qui a fait ses armes dans des productions comme Lastman ou encore les Kassos où son écriture unique imprègne l'œuvre. L’écriture selon Balak c’est du rythme, de la punchline à tout va et beaucoup (vraiment beaucoup) de grossièretés. Cette grossièreté lui a d’ailleurs valu un début de carrière difficile, le forçant à emprunter des chemins de traverses pour faire son trou, tels que la publication directe sur internet et le financement participatif. Le style Balak c’est en général très clivant et interdit aux moins de 16 ans, donc en général soit on adore soit on déteste. 

Une parodie d’un genre usité

Avec ce que je viens de vous dire en tête, je vous présente donc Vermin, l’épopée d’une jeune mante religieuse qui rêve de devenir le meilleur policier de la ville comme son père avant lui et qui pour ça devra faire équipe avec une vieille mouche acariâtre pour avancer dans la folie ambiante. On parle ici donc d’une dynamique du buddy cop movie* très classique mais revisitée à la sauce Bobbypills. L’idée ici est de tourner tous les clichés du genre en ridicule et particulièrement le fait qu’il y a du bon dans toute chose et qu’il ne s’agit que d’une histoire de perspective. Ici rien ne va, tout est sale, tout le monde est ou corrompu ou incompétent ou les deux. Il n’y a rien à sauver dans cette cité de vermines, et chaque instant du récit le rappellera aux personnages. D’ailleurs, quelle excellente idée de faire de la cité une cité d’insectes, on peut ainsi tirer plein profit de cette esthétique rare pour dépeindre un monde de défauts (les escargots lubriques, les moustiques toxicos ou les vers à soie dans les ateliers clandestins).

*Le buddy cop movie est un genre de films où 2 individus que tout oppose sur le papier vont devoir faire équipe et apprendre de l’autre pour arriver à résoudre une enquête criminelle. Ce type de film est tellement codifié et maîtrisé par les scénaristes qu’il est difficile de voir un mauvais buddy cop. Quelques exemples : Starsky et Hutch, l’Arme fatale saga MIB, 21 jump street, Bad boys.

Les yeux plus gros que le ventre.

La série n’est bien sûr pas exempte de défauts, avec particulièrement comme gros point noir l’animation. Je ne pense pas que l’ambition est une mauvaise chose en soi mais qu’ici elle a été mal gérée. On peut passer de scènes très saccadées proches du storyboard à des scènes ultra fluides, et ce fossé espacé de quelques secondes fait très bizarre. Il est évident que les studios d’animation, comme de cinéma, doivent économiser du budget pour des scènes à grand spectacle - des “money shots”- mais là c’est trop pour moi, je trouve ça dommage.

L’écriture “grossière”.

Je n’ai aucun problème avec la grossièreté, pour preuve je suis un grand fan de South Park et pourtant j’ai été un peu déçu par cette série en termes d’écriture. On parle ici d’une série comique dont je pense que seules 40-50 % des blagues font mouche. Une bonne moitié de l’humour est ici de faire dire des grossièretés au personnage, mais les insultes dans le vide et bah c’est moyen comme médium pour l’humour. Bien sûr des fois c’est génial et on rit de bon cœur maïs la routine tue et la répétition lasse. 

Conclusion

On a affaire ici à une série inégale d’un jeune studio d’animation qui se cherche. On passe donc du pur génie à des séquences qui traînent en longueur comme on passe de séquences à l’animation saccadée vers d’autres ultra fluide. Cette série fait en tout 80 minutes ce qui se rapproche du format long métrage et ce qui de mon point de vue se rapproche de la manière de consommer la série. Voyez-la comme un petit film à se faire entre amis un soir avec une pizza sur la table basse. N’en attendez pas trop et vous serez satisfait par ce que vous allez voir et passerez très probablement un excellent moment devant Vermin. (En plus il est sur Netflix)
 

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Par Jonas