© 2024 Dandeloo

Nous avons pu assister à la présentation de la prochaine série du studio Dandeloo, La Rivière à l'envers, sous bien des aspects. Paul Leluc (réalisateur), Céline Ronté (directrice de casting), Héléna Loudjani (superviseuse décor), Pablo Pico (compositeur) et Emmanuèle Petry (productrice) sont ainsi revenu·es sur l'adaptation, la production et la conception de cette bien belle série.



📄 Synopsis
« La Rivière à l’Envers est le récit de la rencontre de Tomek et Hannah sur le chemin de la Rivière Qjar. Hannah espère en recueillir une goutte magique pour sauver son oiseau ; Tomek, lui, rejoint l’aventure à la recherche d’un souvenir perdu. Leurs quêtes se croisent, se succèdent et enfin se complètent. »

Partir de la source et reconstruire le récit 

La Rivière à l’Envers raconte l'histoire d'une rencontre entre deux êtres exceptionnels : Tomek et Hannah. Ces deux êtres singuliers, embarqués dans une quête toute aussi singulière, sont issus de l’imaginaire de Jean-Claude Mourlevat. Chaque roman adopte le point de vue de nos deux personnages : ainsi, le premier roman est narré par Tomek, alors qu'Hannah prend le relais dans le second tome.


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Séduit par les écrits de l’auteur Jean-Claude Mourlevat, le studio Dandeloo s’est tout de suite positionné pour adapter les romans à l’écran. Leur coup de cœur sur cette série était si grand qu’il a débordé et nourri leur ambition d’en faire un long-métrage. Mais l'équipe de production ne se sentant pas suffisamment prête, le format a changé pour devenir épisodique. Au départ constituée de neuf épisodes d’une demi-heure, la série aura comme format final huit épisodes de 22 minutes. La question du format était une problématique essentielle, tout comme l’axe par lequel aborder ce projet : « Beaucoup de studios s’y sont frottés mais n’ont pas réussi », a confié le réalisateur Paul Leluc. 

Une fois le format trouvé, il a fallu répondre à un nouveau défi, celui de l'équilibre financier. Il a fallu bâtir une série à la direction artistique attirante avec les moyens financiers disponibles, tout en utilisant de manière ingénieuse le format. Celui-ci étant maintenant une série, la narration est plus large. La structuration du récit se doit d’être davantage réfléchie tout comme le développement des personnages. Cette dernière étape a posé quelques difficultés au studio et s’est concrétisée après deux ans d'écriture et de réflexion.

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Dans les romans, Tomek et Hannah tombent amoureux très vite et conservent cette relation tout au long du récit. Dans la série développée par Dandeloo, la relation a été changée en amitié afin qu’elle puisse se maintenir sur huit épisodes et que les personnages principaux soient définis par des objectifs individuels clairs. Tomek ne suit pas Hannah dans sa quête uniquement par amour, il a lui aussi sa propre motivation.

Cet « ajustement » scénaristique a permis la création et le développement de nouveaux enjeux comme la création d’un antagoniste ou encore la conception de la mère de Tomek, qui n’est pas présente dans les livres. Dans l’adaptation animée, l’absence de la mère du jeune garçon est devenue sa motivation première.

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Un autre changement fait dans la série par rapport au roman est l'ajout de l’humour dans le récit. Le réalisateur Paul Leluc a choisi d’insuffler une dose d’humour dans la série, quitte à même parfois  surprendre positivement l'auteur. Le personnage de Tomek est présenté comme un « Pierre Richard de l’aventure » qui apprend de ses erreurs et évolue (Pierre Richard est un comédien français très connu pour interpréter des rôles où ses personnages étaient très maladroits). Cette touche d'humour permet non seulement de toucher un auditoire plus  jeune, mais aussi de rassurer les acheteur·euses afin que le récit ne soit pas trop sombre.

Le roman d’origine est un récit que Jean-Claude Mourlevat a écrit sur ses genoux dans le train suite au décès de son père. Cette adaptation animée apporte de la légèreté au récit et à ses personnages sans pour autant se détourner complètement de l’intention de l’auteur et la thématique du deuil. Le studio Dandeloo fait ainsi de ce récit initiatique une histoire capable de toucher toutes les tranches d’âges.

 

Un style semblable à un conte de fées

L'équipe de production de l'adaptation animée s'est confrontée à la tâche d'imaginer les personnages et les lieux à partir des descriptions faites dans le roman. Le studio a rapidement décidé d'une direction artistique léchée, loin des grosses productions. Sous la direction d’Héléna Loudjani, les décors de la forêt ont été inspirés de l’artiste Eyvind Earle, à qui l’on doit les remarquables décors de La Belle au Bois Dormant.

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© Eyvind Earle Sleeping Beauty Concept Art (Walt Disney, 1959)

D’une complexité voulue, les décors de la forêt se veulent marquants et immersifs afin de la définir comme un personnage à part entière. Il y a toute suite eu cette volonté de chercher des pistes d’éclairage différentes avec des lumières issues des levers du jour ou du mauvais temps pour obtenir des environnements étonnants et immersifs.

Pour ce qui est des personnages, bien que l’animation soit faite en puppet, le réalisateur Paul Leluc a pris soin d’indiquer à ses animateur·ices de redessiner certains éléments en 2D traditionnelle (l’animation puppet permet de créer une animation en 2D grâce à une marionnette numérique. Chaque partie du corps du personnage est distincte, ce qui permet un contrôle total du personnage par les animateurs dans les moindres détails. Elle permet un gain de temps considérable face à la méthode  traditionnelle qui demande une animation image par image). De cette façon, les personnages n’ont aucun marquage et les textures sont lisses afin que chaque élément se fonde davantage dans les décors.

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Un habillage sonore réfléchi 

Il y a un soin tout particulier qui a été apporté à la production sonore, que cela soit la composition, le sound design ou l'enregistrement des comédien·nes. A ce titre, le casting révèle un parti pris, puisque les personnages ont des voix très réalistes, loin des voix cartoonesques d'autres productions. Céline Ronté, directrice de casting, à la recherche de nouveaux talents pour plus de réalisme, s’est dirigée vers de jeunes comédien·nes de théâtre. Armé·es du storyboard, Céline et Paul assistent aux sessions d’enregistrement grâce au script annoté. Outre les indications de portées de voix, le storyboard sert de guide pour la direction du jeu, même si l’improvisation reste possible.

Nous avons eu droit à un animatic exclusif où Tomek et Hannah remontent à la surface après avoir secouru Passerine. Nous avons découvert dans cet extrait toute la palette de jeu des comédien·nes, qui étaient totalement crédibles dans leur rôle.

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Quant à la musique, c’est le compositeur Pablo Pico (compositeur notamment sur Sirocco et le Royaume des Courants d'Airs) qui est intervenu sur le projet, à la demande de Céline Ronté, très admiratrice de son travail. Véritable odyssée onirique, la série est peuplée de moments sans dialogues où les personnages errent accompagnés des compositions de Pablo Pico. Il est déjà possible d’attribuer certains instruments à des personnages, comme Passerine avec la flûte.  Il y a également toute une réflexion autour du temps et du courant de la rivière symbolisé par le tic-tac d'horloge harmonieusement intégrés dans des compositions aussi mystérieuses que grandioses.

Pablo Pico © (Photo NR, Julien Pruvost)

 

Un projet unique débordant d’enthousiasme

Lors de cette présentation nous avons eu droit à un dernier extrait exclusif où Hannah se fait capturer par des créatures gigantesques dans la forêt. C’est une scène où l’action et le doute s’entremêlent et c’est une manière efficace de nous plonger in media res dans cet univers mystérieux, au plus près des personnages et de leurs émotions. Outre l’aspect exclusif de cette scène, la présentation de cette dernière permet à l’auditoire de saisir toutes les intentions de réalisation qui ont été présentées point par point lors de ce Work in Progress. Chaque détail prend tout son sens et permet une appréciation totale de la scène et plus largement de cette série qui s’annonce unique.

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Le projet regorge d’artistes motivé·es où chacun·e souhaite produire quelque chose de plus grand que lui. « C’est une production unique qui a la vertu d’exister pour faire briller le métier » , confie le réalisateur.

Lors de ce Work In Progress, nous avons pu voir de nombreux storyboards que le réalisateur Paul Leluc a pris soin d’expliquer. Ses storyboards regorgent d'informations sur les voix, la musique ou la mise en couleurs, bien plus qu'un storyboard classique. Cette façon de faire unique convient à un projet qui l'est tout autant. 

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Débordant d’amour pour ce projet, Paul Leluc a fait lui-même certains bruitages et pensait même parfois à des thèmes musicaux dans les étapes de pré-production. Il est clair que sa polyvalence est une force, renforcée par la passion qu’il laisse transparaître au travers de ses  anecdotes. 
Cette série est le fruit d’un travail intelligent avec beaucoup de complicité au sein de l’équipe créative. Entre une direction artistique maîtrisée et un habillage sonore pensé dans les moindre notes et silences, La Rivière à l’Envers est une série que l’on attend de pied ferme sur CANAL+kids à Noël.

Fin de l'article
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Par Zel