Illustrations réalisées pour agrémenter les communications de l'association Les Intervalles

À l’occasion du Festival international du film d'animation d'Annecy, nous avons tendu le micro à Claire “Paps” Lefranc, président·e et fondateurice de l’association Les Intervalles. Dans un long entretien, iel revient avec nous sur les difficultés rencontrées par les travailleur·euses du film d’animation, contre lesquelles son association lutte : les conditions de travail qui précarisent, les formations parfois inégales et trop souvent inaccessibles, l’impasse que représente l’intelligence artificielle générative mais aussi le manque de variété dans les représentations parmi les œuvres d’animation produites en France.



Claire (Paps) Lefranc (elle / iel) est directeurice de production. Après un Master d’histoire du cinéma à l’université Paris 1 Panthéon Sorbonne, iel débute comme assistant·e de production en 2014, avant de passer chargé·e puis directeurice de production, dans des séries et unitaires d’animation 2D et 3D en France. Iel s’est en parallèle formé au scénario pour écrire ses propres projets de séries et films d’animation et a fondé en 2018 le collectif, depuis devenu association, Les Intervalles.


Roxane Pavard (elle) est une journaliste bénévole de Cartoon Fantasy. Elle rédige des reportages et des critiques pour partager sa passion de l’animation.

Diplômée en juin 2023 d'un master cinéma d'animation à l'Institut Supérieur Couleur Image Design (ISCID) de Montauban, elle y a réalisé son court-métrage "Moineau", visionnable sur le site d'Arte dans le cadre du concours Court-circuit. En tant qu'animatrice, elle est spécialisée en animation 2D cut-out.

Very Dad Trip est son projet de série d'animation comique pour adulte. Il met en scène le road trip d'un père métalleux et de sa fille adulte, dont la relation est abîmée, dans un univers rocambolesque.

 

1. Présentation de l'association Les Intervalles

Roxane : Pour commencer, peux-tu présenter à notre audience Les Intervalles ?

ClaireLes Intervalles est une association loi 1901, qui avant était un collectif libre et qui s’est monté ensuite en association pour que l’initiative perdure, soit plus pérenne et plus solide dans le temps.

On a deux volets de travaux principaux : un premier sur les droits des travailleur·euses dans le film d’animation français, avec des rappels sur comment fonctionnent les syndicats, l’actualité syndicale, les abus qu’il y a beaucoup dans nos métiers, comment se protéger, s’organiser.

Et on a un deuxième volet, qui travaille plus sur le contenu des films d’animation en France, avec une veille des productions, en produisant des rapports et des articles sur : quel type de format se produit le plusquelles sont les représentations genrées et raciales dedansqui réalise, où sont les femmes au développement, pourquoi les rapports existants notamment du CNC et de l’audience sont, pas tronqués, mais sont un peu flous. On relève par exemple que quand le CNC dit qu’il y a un tiers de réalisatrices dans l’animation, une majeure partie est dans le court-métrage, on n’en a quasiment pas en séries et en long-métrages.

En fait, on essaie de repolitiser notre milieu. C’est un secteur jeune, puisque la moitié des travailleur·euses a moins de 35 ans. C’est également un milieu qui se renouvelle très fréquemment, puisque tous les 5 ans, la moitié de effectifs est renouvelée ; enfin, il est un peu artisanal, puisqu’on n’a une convention collective (un droit du travail spécifique à un secteur d'activité) que depuis 2004. Si 20 ans, ça peut paraître long, à l’échelle de l’animation qui existe en tant qu’industrie en France depuis les années 70-80, c’est pas énorme. Comparativement, à l’échelle du cinéma, où iels ont une convention collective depuis la fin des années 40, c’est encore moins.

En plus de repolitiser le milieu, on souhaite vraiment le rendre plus pérenne. On pense que le milieu ne pourra survivre que si justement ses travailleur·euses savent un petit peu ce qu’iels font, dans quoi iels mettent les pieds, parce que le format actuel d’avoir un renouveau constant tous les cinq ans, ça ne peut pas fonctionner. On le voit déjà parce qu’on a une crise de seniors sur le marché ; notamment en 2D, où on n’a pas assez de seniors pour certains postes : iels ne sont pas assez nombreux·ses pour de multiples raisons (précarité, mise à jour technologique, carrière internationale etc.) et qu’ils disparaissent du marché.

Roxane : Combien êtes-vous au sein de l’association actuellement ? Est-ce que vous recrutez ?

Claire : Pour l’instant, on est une douzaine de personnes, on fonctionne en hiérarchie horizontale, donc tout le monde n’est pas dispo tout le temps, tout le monde ne travaille pas sur les mêmes volets, mais on essaie de prendre des décisions communes via notre discord et via nos assemblées générales ; l’idée étant que, moi qui ai créé l’association, je puisse m’en éloigner, si besoin, un petit peu et que je sois pas seul·e à la tenir  à bout de bras.

On essaye de s’agrandir : on a très récemment lancé une campagne d’adhésion, pour encourager les gens qui nous suivent et qui sont majoritairement des jeunes diplômé·es et des étudiant·es à nous rejoindre en disant qu’iels peuvent participer à leur échelle, pas tant pour avoir de l’aide financière parce qu’en soit, on n’a pas besoin d’avoir beaucoup d’argent pour l’instant, on se débrouille, mais plus pour avoir des gens qui nous aident à l’écriture des articles, à la veille médiatique, à la relecture, qui nous aident à faire des visuels, à tenir le site… Au bon fonctionnement de l’asso quoi.

Roxane : Et sur quels médias et plateformes est-ce qu’on peut vous trouver ?

Claire : On a un site web, LesIntervalles.fr, et on est aussi très présent·es sur TwitterInstagram, et Facebook

Facebook parce qu’il y a deux groupes professionnels historiques qui existent dessus, donc on a quand même, même si notre cible est jeune, beaucoup de gens qui se trouvent dessus, une grosse partie de notre cible qui l’utilise encore. Twitter, c’est plutôt pour réagir à chaud à l’actualité, et Instagram c’est parce que notre cible est très présente sur cette plateforme, et pour partager nos travaux, c’est quand même beaucoup plus pratique. On n’est pas encore sur TikTok, nos publications ne sont pas vraiment adaptées à cette application. 

Roxane : On a beaucoup aimé vos articles qui sont très recherchés et qui s’inspirent des codes de la recherche. On voudrait savoir comment vous travaillez ces articles, comme par exemple celui sur le sujet de l’IA, qui est très intéressant.

Claire : C’est un peu de ma faute, en vrai c’est plus un boulet qu’autre chose parce que… je viens de la fac, j’ai un Master d’Histoire du Cinéma, donc je sais faire de la recherche, je sais écrire à la manière d’universitaire, mais on a un public et même des bénévoles qui viennent plutôt d’écoles d’animation. Ça s’apprend, faire de la recherche et écrire, c’est comme tout, c’est pas inné, et on sait qu’on a une partie de nos papiers — les plus gros, les plus importants — qui pourraient toucher plus de monde s’ils étaient un peu plus concis et accessibles. 

Donc on fait de la recherche, et on a fait une aide à l’écriture pour les gens de l’asso qui veulent se lancer et qui n’auraient pas confiance parce qu’iels n’ont pas ce background de recherche. On leur donne des conseils justement pour faire ces recherches là, et en parallèle on va essayer de faire des versions des articles qui soient aussi plus résumées, en petites BDs, en format spécifique pour les réseaux sociaux.

Là on a un gros dossier par exemple, d’une trentaine de pages, qu’on va bientôt sortir, sur le fonctionnement des écoles payantes d’animation en France, et on sait que si on n’en fait pas une version avec une dizaine de slides maximum, on perd quasiment un tiers des lecteur·ices.. Donc en soi, oui, ce sont des articles recherchés, travaillés, mais c’est plus pénalisant qu’autre chose, vu notre cible, qui n’est pas forcément une grosse lectrice de papiers de recherche.

Roxane : D’accord. Je comprends totalement, parce que comme moi aussi j’arrive de la fac, et que j’aimais beaucoup aussi tout le travail de recherche, je sais que quand j’écris mes articles sur des films j’ai tendance à être beaucoup trop dans la recherche, l’analyse, quelque chose de très poussé et je dois me dire des fois non, il faut que je retourne un peu en arrière, que je reste plus légère parce que ce n’est pas…

Claire : Plus accessible, aussi…  Non pas qu’on prenne notre lectorat pour des idiots, mais les gens qui font la relecture dans l’asso sont aussi dans l’animation, et quand eux nous disent « Je galère à la relecture », il faut simplifier. 

On va continuer à écrire des articles et des rapports sourcés et travaillés, mais on va aussi essayer d’en faire des versions plus concises, plus accessibles et plus résumées.

 

2. Les représentations dans les œuvres d’animation

Roxane : On sait que 80% des handicaps sont invisibles et que les personnes en situation de handicap souffrent souvent d'une invisibilisation. Est-ce que vous avez déjà envisagé d’étudier les représentations des personnes en situation de handicap dans les œuvres d’animation ?

Claire : On l’avait fait sur deux études, une sur les représentations dans l’animation dans les séries d’animation françaises entre 2010 et 2020, et une autre équivalente sur les long-métrages d’animation français de 2010 à 2020. Ce qui ressort, c’est que justement, le handicap, quand il existe, ne l’est qu’en étant très visible - il manque un membre ou le personnage est en chaise roulante - les handicaps invisibles ne sont jamais traités.

Ça n’existe pas. Dans le sens où, pour qu’un handicap soit traité, il faut que le personnage soit suffisamment développé, parce que ce n’est pas écrit sur sa figure. Or, la très grosse majorité de nos séries sont des séries bouclées : les épisodes sont écrits de manière à être visionnés dans n’importe quel ordre, et dans cette logique, les personnages sont souvent réduits à quelques traits de caractère principaux. Et si parfois les fandoms se réapproprient un personnage, comme ça se fait souvent, et décident qu’il est sur le spectre autistique par exemple, ou qu’il a un TDAH ou autre, ce n’est pas canon.

Ce n’est pas quelque chose qui est pensé de toute façon ; de manière générale, il n’y a aucune réflexion dans le secteur du film d’animation sur les représentations des communautés minorisées.

On essaye justement de réveiller les gens là-dessus, de leur faire prendre conscience qu’on a un devoir, vis-à-vis de notre public qui est quand même en majorité un public jeunesse, et qu’on participe beaucoup à la construction de leur identité en tant qu’individus de par les œuvres qu’on leur propose.

Donc on essaye de faire prendre conscience aux gens que la représentation, c’est important, et pour le handicap, c’est pas compliqué, il n’y a rien. En handicap visible, il y a deux ou trois séries sur ces douze dernières années. C’est tout.

Captation par 3DVF de la table-ronde organisée au Festival international du film d'animation d'Annecy 2024, portant sur la question de l'inclusivité et de la diversité en animation, que ce soit à l'image ou dans les studios.

Roxane : Et à ton avis qu’est-ce qui bloque, dans l’industrie de l’animation, pour avoir plus de représentation et en meilleure qualité, notamment, dans la question des handicaps ?

 Claire : On est un microcosme, ce qui fait que c’est un peu tout le temps les mêmes personnes qui prennent les décisions, et ce ne sont pas, paradoxalement, forcément des personnes qui sont des fans d’animation. 

Moi je trouve que ce serait vachement bien d’avoir des gens à la tête des studios qui aiment l’animation, dans le sens où, ils savent ce que regardent les gens actuellement. Qu’ils savent qu’il existe des fandoms, par exemple. Il n’y a aucune prise en compte des fandoms en France, alors que Dieu sait que ça peut ramener de l’argent sur un projet.

Il faudrait aussi que ce soit un petit peu plus ouvert, parce que parfois, on voit passer des projets et on se dit « Comment ça, ça peut avoir le feu vert, alors que c’est du vu, vu et revu ? », sauf que du point de vue du producteur et du distributeur le vu, vu et revu c’est facile à vendre. 

Les projets sont très lissés, et c’est ça la difficulté aussi, il faudrait des producteur·ices et des distributeur·ices qui soient plus à même de vouloir prendre des risques et d’être ouvertement progressistes. Et on parle de risques minimes, parce que ce n’est pas parce qu’il y a un personnage en fauteuil roulant que ton projet ne va pas se vendre. Mais dans leurs têtes, c’est quand même toujours plus simple de faire des séries avec un héros blanc, son meilleur ami gros rigolo ou seul personnage racisé qui sert de token, et sa meilleure amie qui finit par être son love interest.

C’est vrai que ça va plus vite, et c’est aussi parce qu’on adapte beaucoup des IPs, c'est-à-dire des œuvres préexistantes, des jeux vidéo, des BDs, et les BDs à succès ne sont pas forcément les plus progressistes qui soient. 

Parfois il y en a des très bien, mais… Par exemple, il y a quelques années on a réadapté la bande dessinée des années 80 Les Triplés. Déjà à l’époque, elle était très conservatrice, et puis en 2023… elle était vraiment gênante à regarder. 

Il n’y a aucune réflexion sur ce qu’on produit, très peu de prises de risques, aussi parce qu’on est trop dépendants de la coproduction internationale ; on n’est pas Cartoon Network qui est à la fois la chaîne et le producteur. On ne peut pas décider de faire quelque chose, tout seul.

On est dépendants d’autres structures donc on ne peut pas prendre les décisions seul·es et clairement ça ralentit beaucoup l’évolution progressiste que devraient suivre nos productions

Roxane : Est-ce qu’il y a des séries ou des films qui t’ont marquée récemment mais dans le bon sens, question représentation…

Claire : Français ou international ? (rire)

Roxane : On va viser large, international.

Claire : Oh international, oui, les Américain·es se sont réveillés depuis la génération Adventure Time, iels ont compris que oui, mettre des gens qui venaient de backgrounds super diversifiés, des personnes queers aussi, à la tête des séries, ça marchait super bien. 

Il y a The Owl House qui s’est terminé l’année dernière, qui est une très très bonne série ; j’ai tendance à dire que c’est Harry Potter mais en bien. Et qui est centré sur le personnage de Luz, une jeune fille qui est une énorme nerd. Elle adore la fantasy, elle écrit des fanfics…  Elle se retrouve dans un monde magique avec des sorcières et au lieu de se dire « Comment je vais rentrer chez moi ? », elle embrasse ce nouvel univers en disant « C’est génial, c’est tout ce dont j’ai toujours rêvé » et elle va évoluer dans ce monde là… On sent déjà l’amour de la culture nerd, du cosplay, des fandoms, et on sent aussi que c’est pas des vieux mecs blancs qui ont écrit la série.

Et en France, récemment, j’en ai vu une super originale, qui s’appelle Le Collège Noir et qui est adaptée de la bande dessinée éponyme, qui est réalisée par le mec qui a écrit la BD, qui est un animateur aussi. Il a monté son studio d’animation il y a quelques années et c’est sa BD qu’il a fini par adapter et elle est très très cool cette série là parce que c’est de la série d’horreur, mais à hauteur d’enfant. Ce dont on manque cruellement dans l’animation. 

De manière générale, les films de genre ne sont pas très courants en série jeunesse. On a un peu de SF et de fantastique, mais très lisse et souvent insérée dans un contexte de tranche de vie et de série bouclée, peu ambitieuse. Et Le Collège Noir est vraiment cool, bien pensé, et on sent qu’ils se sont fait plaisir sur la mise en scène, c’est vraiment très fun à regarder. Et elle est dispo sur France Télé pour le coup. Que demande le peuple ?

Roxane : Plus de séries comme ça !

Claire : Ah oui, très clairement. 

 

3. Les conditions de travail des travailleur·euses de l'animation

Roxane : Je te propose de parler des conditions de travail des personnes qui travaillent dans l’animation.

Claire : Bah elles sont pourries, hein, c’est pas compliqué ! (rires)

Roxane : Plot-twist !

Claire : Scandale ! C’est mal fichu !

Elles sont pourries parce qu’on a des syndicats qui jusqu’à présent ne sont pas très forts ; nous, on encourage constamment les gens à se syndiquer, mais ça fait un peu peur, les syndicats. On s’imagine Martinez avec sa grosse moustache qui va griller des saucisses en manif. Mais, en vrai, les syndicats sont faits de personnes qui travaillent dans l’animation et qui peuvent faire remonter les problématiques sur lesquelles il faut travailler. 

Par exemple, sur un de nos syndicats représentatifs, depuis 2015, il y avait des alertes sur un abus au contrat dit « au forfait ». Je mets des guillemets, parce que le contrat au forfait, c’est un truc qui existe mais là il y avait des abus pour les storyboarders : on donnait un temps de travail au storyboarder, par exemple 5 semaines, pour faire un épisode, et on leur disait, « Si t’as pas fini au bout de 5 semaines, tu finis quand même l’épisode par contre tu seras pas payé pour les jours supplémentaires. » Et ça, c’était dans 90% des studios d’animation. Une pratique complètement banalisée. 

Roxane : Et ils devaient donner des délais courts, peut-être trop courts.

Claire : En plus, oui, les délais étaient souvent trop courts. Ça s’est cumulé à des tâches supplémentaires qu’on demandait aux storyboarders qui dépassaient leur fiche de poste. Le syndicat en question, le SNTPCT, a travaillé longtemps dessus et a réussi il y a peu à faire introduire un avenant dans la convention collective pour s’assurer qu’il ne puisse plus y avoir cet abus. 

Dans les autres abus banalisés qu’on a, malheureusement dès les écoles d’anim, c’est les heures sup non payées et non comptabilisées. Comme on fait ce qu’on appelle un « métier passion », c’est un peu compliqué parfois de se plaindre en disant « Je ne travaillerai que les heures où je suis payé·e » parce qu’on te répond souvent « Te plains pas, tu fais un métier que t’aimes… T’es un peu rapiat, je pensais que tu faisais ça pour l’amour de l’art plutôt que pour l’argent » alors que ça reste un métier,  même si on l’aime, on met notre expérience et talent au service d’un studio, et on mérite d’être payé comme tout salarié·e.

Et en plus ça nous pénalise nous, individuellement, en tant que travailleur·euses de devoir faire des heures sup non payées, parce qu’on perd de l’argent, parce que ça veut dire qu’on ne cotise pas aussi. Ça pénalise toustes nos camarades, toustes les collègues sur une même production, parce que ça veut dire que par exemple s’il y en a un, un peu senior, il fait des heures sup tous les jours parce qu’il a toujours bossé comme ça, ça va culpabiliser celleux qui sont plus juniors en se disant, « Faut que je fasse pareil. »

Ou à l’inverse, tu peux avoir aussi des juniors qui vont dire « Je vais travailler des heures sup gratuitement pour montrer que j’en ai que je suis dynamique », alors qu’iels vont juste montrer qu’iels savent se faire exploiter. Ce n’est pas une bonne chose et c’est comme ça qu’on court au burnout. 

Roxane : Je sais que j’étais dans une école d’animation alors un peu particulière, ça s’appelait l’ISCID donc c’était un master public.

Claire : À Toulouse ?

Roxane : Oui. On était plus formé·es à être artistes que technicien·nes, et un de nos intervenant·es, Morad Rahni, nous avait justement expliqué que les studios ont tendance à prendre plutôt des jeunes qui veulent absolument se faire une place.

Claire : Qui acceptent tout et n’importe quoi, ouais.

Roxane : Et comme ça, en plus de pouvoir les faire travailler plus, vu que c’est des juniors, ils sont payés moins cher, et les seniors qui demandent trop d’argent on peut les virer.

 

Captation par 3DVF de la table-ronde organisée au Festival international du film d'animation d'Annecy 2024 :  « En 2023, la situation de l'emploi dans l'industrie de l'animation s'est dégradée brutalement. En parallèle, la difficulté de trouver un stage revient chaque année sur le devant de la scène dans les écoles et studios. »

 

Claire : Voilà. Et après, on se retrouve avec une industrie qui n’a pas assez de seniors à certains postes. Moi j’étais récemment sur un gros projet, et y avait en parallèle trois autres gros projets en 2D en France :  Splinter CellArcane, qui est pas full 2D mais qui a des éléments 2D dedans, et La Métaphysique des Tubes, qui demandent pas mal de seniors. J’avais besoin à certains postes de personnes un peu seniors parce que le gros projet sur lequel je travaillais avait un style difficile à récupérer. Personne n’ était disponible, iels étaient tous sur ces trois prods-là.

Donc je me retrouve en difficulté parce qu'en parallèle, je ne suis pas censé embaucher de freelance pour des postes existants dans la convention collective, mais je me retrouve à chercher des profils qui travaillent uniquement sous ce statut. Je peux embaucher des gens en freelance à l’étranger mais c’est quand même dommage de devoir aller chercher des gens dans un autre pays, quand j’ai des gens très bien sur place, mais qu'on ne fait rien pour qu’ils restent.

En plus, les gens qui travaillent depuis l’étranger, légalement, on doit pouvoir prouver qu’on a cherché des gens qui résident en France, avant de dire qu’on est allé chercher à l’étranger, ce que personne ne fait, tout simplement parce que c’est pas faisable du fait de l’organisation de notre industrie. Mais si on a un contrôle financier, eh bien on l’a dans l’os. 

 

Captation par 3DVF de la table-ronde organisée au Festival international du film d'animation d'Annecy 2024 pour discuter des actualités syndicales, telles que l’IA générative, les salaires ou les conditions de travail

 

Donc il y a beaucoup d’abus, beaucoup de trucs qui sont appris dès l’école, comme dans celles de jeux vidéo, notamment le « crunch », ce qui fait qu’on récupère après des gens en studio qui ont un rapport au travail qui est très très malsain dès le démarrage.

Il y a aussi un rapport flouté entre les limites personnelles et le professionnel, parce que notre secteur fonctionne comme le reste du cinéma et de l’audiovisuel, au copinage et au réseautage. Ce qui fait que les gens qui nous recrutent, parfois c’est nos copaines, c’est nos ami·es ; donc y a des limites qui sont compliquées à poser, et des choix de recrutement qui parfois sont un peu malaisés, parce que mon chef de poste, il a envie d’embaucher son pote même si son pote c’est pas forcément la personne la plus adéquate pour le projet, et bah il va quand même l’embaucher. 

Et ça typiquement, ça joue aussi sur le peu de présence des femmes aux postes à responsabilité. Parce que comme historiquement c’était des mecs à ces postes, ils vont embaucher des gens qui leur ressemblent — logique —  des potes à eux, et leurs potes c’est d’autres mecs. Ça fait un cercle vicieux où ils s’entraident tout le temps et puis c’est dur de percer la bulle quand on est une femme et de dire « En fait, je suis très bien aussi, embauchez-moi. »

 

4. La formation

Roxane : À présent, une question par rapport aux écoles d'animation. Ce que j'ai pu constater dans mon école, c'est qu'on nous disait qu'on nous formait pour être artistes ; dans les grosses écoles d'animation françaises, on a un très bon savoir-faire, on est très bien formé·es mais on a tendance à former des profils plus techniques. Les écoles d'animation françaises proposent une excellente formation technique, mais pensez-vous qu'elles cultivent assez l'esprit créatif ?

Claire : Ça dépend. Il y a des écoles qui forment des artistes, d’autres des technicien·nes, et des écoles qui forment des artistes-technicien·nes. Pour moi, souvent, les bonnes écoles forment des artistes-technicien·nes, c’est-à-dire des gens qui sont un peu créatif·ves, mais qui connaissent aussi le fonctionnement de leur secteur professionnel, les limites qu’iels doivent prendre en compte sur un projet etc. 

Les écoles qui ne forment que des technicien·nes, souvent c’est plus en 3D. En 2D, on a à l’inverse toustes les artistes, mais qui sont parfois plus difficiles à intégrer aux productions, qui sont quand même très encadrées sur le style, sur la durée de travail.

Roxane : Est-ce que vous pensez qu’une personne d’origine modeste peut réussir à atteindre les mêmes opportunités d’étude qu’une personne plus privilégiée ? Parce que les écoles d’animation, on le sait bien, ça coûte très très cher. 

Claire : Ça coûte très cher, en effet. Il y a des écoles publiques, quand même ; le problème, c’est qu’elles ont très peu de moyens, elles n’ont pas les logiciels notamment avec lesquels on travaille le plus. Après, il y a quelques autodidactes qui s’en sortent, surtout aujourd’hui où il y a énormément de tutos en ligne, de livres qui en parlent et qui se trouvent en bibliothèque, donc c’est faisable. Et il y a certaines écoles, aussi, qui proposent des bourses. 

Il y a beaucoup d’élèves qui prennent des prêts, mais c’est vrai qu’on reste un milieu assez bourgeois, où on a plus d’opportunités quand, typiquement, on n’a pas travaillé pendant ses études, on n’habite pas trop loin de l’école, et on peut se permettre d’être vraiment concentré·e dessus. D’avoir par exemple aussi un très bon ordinateur pour travailler à la maison, pendant ses études, en plus de l’ordinateur de l’école. Parce que l’école ne prête pas toujours les ordinateurs et les licences. 

Donc oui, clairement, on reste un milieu bourgeois. Nous, quand on fait nos récaps des projets qui sont en développement, qui sont présentés au Cartoon Forum, au Cartoon Movie, qui sont des grosses conventions professionnelles, on est toujours étonné·es de voir le nombre de gens qui ont des noms à particule ! Alors, ça ne veut pas dire qu’ils sont richissimes mais c’est quand même étonnant. En fait, c’est une indication sociale. Le jeu vidéo a un peu ce problème aussi, mais comme eux à la clé ils ont des emplois plus stables, des CDI, ils ont plus de personnes qui tentent l’aventure en venant de milieux plus modestes, plus populaires, parce que ça rassure les parents de se dire qu’à la clé il y a des CDI. Nous, on est des saltimbanques, à la clé, y a des intermittents du spectacle, du chômage un peu constant, et dans la tête des parents, faire du dessin animé c’est quand même moins rentable que faire du jeu vidéo.

Le jeu vidéo, on en parle plus, c’est plus visible… Nous on fait des petits Mickey, c’est pas vendeur pour les parents. Donc c’est aussi plus dur quand on vient d’un milieu modeste de convaincre ses parents, ne serait-ce que dire, « Aidez-moi à faire un prêt à la banque pour que je puisse faire mes études » parce que les parents vont dire « Pour que tu fasses quoi derrière, que tu sois au chômage, intermittent et que tu bosses deux mois par an ? » Je peux comprendre que ça soit plus compliqué. Donc oui, clairement on n’a pas les mêmes opportunités.

 

5. L'IA générative

Roxane : On sait que l’IA pose de nombreux problèmes, sur le vol de bases de données nécessaire pour entraîner les IA ou encore sur le coût écologique que ces technologies représentent. Selon vous, est-ce que l’IA ne peut être qu’une mauvaise chose pour le monde de l’animation ?

Claire : Les IA génératives, pas les IA dans l’ensemble. Je précise parce qu’en soi les IA, c’est des algorithmes, ça fait des années qu’on en utilise notamment en 3D. L’IA générative dans le milieu de l’anim, quelque chose qui va « s’inspirer », je mets des gros guillemets, d'œuvres préexistantes pour en générer un conglomérat, un plagiat, non, je vois pas l’intérêt. Y avait une créatrice — j’ai oublié son nom, pardon madame — qui avait dit en ligne « Oui, moi je voudrais que l'IA fasse ma lessive, ma comptabilité, la vaisselle et qu’elle me laisse faire l’artistique et pas l’inverse ». C’est tout à fait ça.

On en a même rediscuté avec les syndicats, au carrefour associatif qu’on a tenu en début de semaine, et on avait un des syndicats qui disait, « Ça peut nous permettre de gagner du temps, par exemple pour le décor layout — donc on a un décor de référence et on doit faire un bon angle de vue du décor à chaque plan, et ça peut nous éviter d’avoir à redessiner ce décor layout », et y a une décoratrice dans la salle qui a dit « Mais moi, c’est mon métier, je l’aime bien ce métier, je trouve ça cool de revoir un décor à chaque vue différente, et là ce que vous dites, c’est que pour aller plus vite on va squeezer mon métier, on va le supprimer, comme ça, ça évitera aux studios de dépenser pour rien, mais… C’est pas utile ! »

J’ai déjà vu des discours qui disent que l’IA générative va permettre à des gens qui ont pas fait des études d’anim de développer leurs propres projets. Soit parce qu’ils n’ont pas d'argent, soit parce qu’ils sont handis, ou pour plein de raisons, et moi je ne suis pas du tout d’accord, je dis non.

Roxane : C’est étrange comme réflexion, parce que ça serait comme si par exemple l’IA ou un robot pouvait nous permettre d’être aussi fort qu’un grand sportif, me faire courir aussi vite, du coup l’ironie, c’est que je suis peut-être au niveau d’un grand sportif, mais je suis toujours pas forte en sport, en fait.

Claire : C’est comme si tu te mettais un exosquelette ou un casque VR, que tu te mettais face à Usain Bolt, que t’allais plus vite que lui et que tu faisais « Haha, regarde, je pouvais pas le faire avant, maintenant je peux le faire ! »

Roxane : En fait non, tu ne sais toujours pas le faire, tu as juste cette chose là qui te permet de le simuler pour toi.

Claire : Oui, voilà.

Et en plus, c’est pas vrai, parce que et les personnes précaires et les personnes handicapées, y en a déjà des créatrices. Alors, certes, elles galèrent un peu plus et, ce qu’il faudrait, c’est améliorer leurs conditions d’accès à l’animation et globalement aux milieux artistiques, pas leur dire « Regardez, on a créé un outil qui va voler les autres et qui va vous permettre à vous de vous y mettre. Par contre, vous n'avez toujours pas accès aux cursus professionnels et aux écoles existantes. »

 C’est une excuse, et pour le coup ça avait été déjà pas mal débattu dans le milieu de l’anim américaine, sur Twitter, et ça grognait pas mal ces dernières semaines parce qu’il y en avait plusieurs qui avaient ressorti ces arguments, et il y avait des artistes handis notamment qui avaient dit « Moi je suis handi et je crée quand même, ne vous servez pas de nous comme excuse ». En plus, c’est faire du misérabilisme : « Regardez les pauvres malheureux, on va les aider avec un outil qui vole leur travail. »

Roxane : Surtout que, avant l’IA, ils n'en avaient pas grand chose à carrer de toute façon.

Claire : Oui voilà. C’est vraiment une excuse qui est assez nulle. L’IA générative, je ne suis pas du tout pour.

Roxane : Et surtout que le monde de l’animation, c’est toujours un équilibre entre le côté artistique, la création, et le business…

Claire : L’industriel, oui.

Roxane : Parce qu’il faut que ça soit rentable pour pouvoir continuer à le faire, et là en fait ça va de plus en plus uniquement dans le business, on oublie l’humain et c’est juste une question de rentabilité et d’ argent. Si on prend le problème uniquement par ce prisme-là, dans ce cas, l’IA est très intéressante, parce que ça permet de faire des économies. Mais, au final, quel est l’intérêt s’il y a pas d’humain derrière ?

Claire : De toute façon, nous on le répète toujours, en école, on vous dit « Regardez, on est une grande famille, bisounours, tout le monde s’aime, ça brille, regarde, des paillettes et tout ça » ; mais ça reste un business, ça reste une industrie avant tout. Certes, on est une industrie un peu plus détendue que la moyenne… On vient pas en costard-cravate au boulot, on a des horaires plus souples…

Roxane : On peut venir en tongs.

Claire : On peut venir en tongs, on est nombreux à avoir des looks un peu décalés, ça se voit notamment au festival ; moi, je suis directeur de production, j’ai plein de tatouages, j’ai la moitié du crâne rasée, et tout le monde s’en fout. Par contre, ça reste quand même un business, une industrie qui est censée être rentable et les patronats et certains artistes qui se prêtent au jeu, parce qu’ils ont intériorisé ces abus, n’hésiteront pas à faire en sorte qu’on se marche dessus les uns les autres, pour gagner un peu d’argent. D’où l’intérêt de créer du collectif. C’est vraiment très important.

Roxane : Est-ce qu’il y a des studios d’animation qui ont peut-être des démarches qui peuvent être intéressantes par rapport au travail, à la création…

Claire : Y a aucun studio qui est parfait, ça n’existe pas, y a certains studios plus recommandables que d’autres par contre. Récemment, pendant le festival, un studio, le premier français qui s’est ouvertement positionné contre l’IA, avec un badge marqué « Made by humans », c’est La Cabane, et il y a quelques studios aussi qui ne fonctionnent pas sur la base de la société anonyme classique, qui ont un format SCOP qui est un format plus proche de l’associatif, les gens qui participent à la société ont des parts dans la société, et y en a plusieurs notamment Les Fées Spéciales, qui est à Montpellier. Il y a des boîtes plus petites qui essaient de développer des trucs plus persos, notamment La Cachette, qui a fait Le Collège Noir, vraiment eux ils choisissent leurs projets… Ça ne veut pas dire que les conditions de prod sont parfaites cela dit.. 

La Chouette Compagnie essaie de développer des projets notamment inspirés du folklore maghrébin, ce qui est assez cool. Il y a aussi  Special Touch qui dit ouvertement vouloir amener des récits d’autres imaginaires, c’est-à-dire venus d’Asie, d’Afrique, d’Amérique du Sud… Pareil encore une fois je ne connais pas les conditions de travail là-bas mais la démarche reste novatrice et intéressante à suivre.

Roxane : Ça me fait penser justement parce que j’étais à la présentation du Robot sauvage de DreamWorks, et ensuite leur conférence, et ils ont mis sur leur diaporama, « Fait uniquement par des humains ». 

Claire : Ouais, bah, eux ils ont compris que ça risquait de leur revenir dessus. Et nous en France on n’y est pas encore.

Roxane : Surtout que je pense que DreamWorks, c’est un énorme studio, c’est ceux où il y a le plus de risques qu’ils utilisent l’IA, justement…

Claire : Je pense surtout qu’iels ont des avocats aussi qui leur ont dit « Protégez-vous, précisez bien ça que ça ne vous revienne pas dessus », parce que comme l’IA générative se développe très vite, même si on apprend à force à la repérer, maintenant c’est vrai qu’il y a des oeuvres parfois j’ai un moment de doute en me disant, est-ce que c’est l’IA, est-ce que c’est fait par l’humain, selon les styles, préciser que ça a bien été fait par des humains, c’est aussi pour se protéger de tout procès en diffamation ou en plagiat… C’est une logique d’avocat, je pense… C’est pas une logique éthique, c’est pas le but. C’est une grosse boîte, c’est pas des bisounours, malheureusement, ça n’existe pas.

Roxane : Et pour avoir vu deux courts-métrages faits en IA, si on oublie tout le côté éthique, c’est quand même pas très intéressant. C’est laid.

Claire : Y avait une artiste j’ai vue aussi à une conférence sur l’IA générative, une artiste qui s’était basée sur son propre travail, elle avait quand même fait de la stop-motion, filmé et tout ça, et elle avait utilisé Stable Diffusion, une IA générative, comme un filtre de rendu. Donc là elle dit « Bah moi j’ai pas volé du travail vu que je me suis basée sur le mien ». Sauf que écologiquement ça reste dégueulasse comme logiciel, elle a quand même entraîné l’IA à utiliser ses éléments qui seront peut-être récupérés par la suite, et malgré tout elle encourage une utilisation de cette technologie qui se base sur le vol des données. 

Et comme en plus on voit que l’IA générative se nourrit de ce qu’elle trouve en ligne, et en ligne il y a énormément de contenu raciste, homophobe, sexiste, et l’IA fait pas la distinction, elle va juste refourguer un gloubi-boulga de ce qu’elle a vu le plus. Et c’est pareil pour les IA discursives, y en avait une il y a quelques années qui avait été entraînée à discuter, en se nourrissant de ce qu’elle trouvait sur Internet.  En deux jours elle était devenue nazie. Parce qu’elle avait trop traîné sur 4chan, sur Reddit, et boum ! C’est horrible.

Et même sans aller jusqu’à ces extrêmes, l’IA, elle va se nourrir de ce qu’elle trouve, donc à un moment, elle va se nourrir de trucs déjà générés par IA, donc elle va finir par tourner en rond, et les représentations qu’elle va proposer seront encore plus lissées, encore plus limitées, ça va tout le temps être la même chose. 

Pour l’instant c’est une technologie qui évolue très très vite, qui est pas viable dans les studios parce que on peut pas demander à une IA de faire une retouche par exemple si le client dit « Mets-moi quelque chose d’un peu plus bleu » l’IA va juste regénérer quelque chose de zéro, elle peut pas faire de retouches, donc ça marche pas. Donc, pour l’instant, elle est pas ultra viable, mais elle est déjà très utilisée dans les milieux du design graphique notamment print [Ndlr : il s’agit du design graphique imprimé, tel que la production et l’impression d’affiches ou de flyers], il y a beaucoup de pubs faites avec des IAs, on peut les voir sur les abris de bus, pour les JO, même. 

Mais même si elle devenait un jour viable, il faut d’abord qu’on s’assure de son encadrement strict, pour le droit d’auteur, pour éviter une utilisation complètement chaotique qui consomme quand même, je le rappelle, énormément d’énergie. On imagine des équivalents d’entrepôts Amazon entiers remplis de serveurs réfrigérés H24, c’est énorme, quand même. 

Pour moi ce n’est pas un besoin de la profession. Personne, aucun·e artiste ne s’est dit « Ah ouais, ça m’aiderait vachement », en fait

Roxane : Aucun·e artiste n’a envie de dire « J’aimerais bien ne pas travailler. »

Claire : Voilà, ou même aucun·e artiste ne s’est dit « Je suis mauvais, ça va m’aider ». Bah non, je vais bosser avec des artistes qui sont bon·nes ! C’est un métier collectif. Les comparaisons technologiques en ce sens avec la 3D marchent pas, parce que quand la 3D est arrivée c’était un outil qui existait déjà dans d’autres milieux, et c’était un nouveau type de rendu, des nouveaux outils qui n’allaient pas ni voler ni plagier ce qui existait en 2D, qui allaient juste proposer un élargissement de ce qu’on entendait comme création.

Donc c’était pas vraiment comparable, cela dit si la 3D arrivait aujourd’hui, vu ce que ça consomme en terme de rendu, on pourrait se poser la question de dire « Est-ce qu’on doit faire autant de 3D qu’on en fait maintenant ? » vu le poids écologique du hardware, du software, du rendu… Peut-être pas, peut-être qu’il faudrait se poser la question.

 

Roxane : Merci beaucoup de nous avoir accordé du temps.

Claire : De rien. Si ça peut donner une meilleure idée aux gens de comment fonctionne le milieu, c’est toujours cool. 

Fin de l'article

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