Castlevania_Titre

Avec ses antagonistes particulièrement bien écrit·es et son animation dynamique, la série “Castlevania” rend un bel hommage aux jeux vidéo du même nom. Malgré un traitement inégal de certaines intrigues qui crée un rythme parfois bancal, on prend beaucoup de plaisir à plonger dans cette œuvre de dark fantasy, capable de nous faire ressentir des émotions très variées.



Castlevania est une série d’animation américaine d’action aventure fantasy pour adultes, sortie en 2017. Créée par Warren Ellis et développée par Adi Shankar pour Netflix, la série se compose de 4 saisons et 32 épisodes. 

« Lorsque sa femme se fait brûler vive, accusée à tort de sorcellerie, le vampire Vlad Dracula Tepes déclare qu'il prendra sa revanche sur le peuple de Wallachia. Aidé de la magicienne Sypha Belnades et du propre fils de Dracula, Alucard, le chasseur de démons Trevor Belmont lutte contre la terreur qu'il instaure. »

 

De jeu vidéo à animé

La série Castlevania est une adaptation de la franchise de jeux vidéo Castlevania, débutée en 1986. Bien qu’elle reprenne la direction générale de certains titres, comme Castlevania Symphony of the light pour la saison 1 et 2 par exemple, elle adapte librement cet univers. Les personnages principaux (Trevor Belmont, Alucard, Dracula, etc.) sont repris et approfondis. Quant à l’univers, il est agrandi et exploré plus en profondeur. 

Castlevania Symphony of the light, Konami, 1997.

L’animation japonaise, particulièrement les animés, est l’inspiration qui a sculpté toute la série. L’identité graphique de la série prend sa source dans le jeu Castlevania: Symphony of the Night, l’animé Cowboy Bebop, et surtout Berzerk. Ainsi, la série coupe les ponts avec le style cartoon des séries américaines des années 2010 et ses formes rondes et colorées (type Rick et MortyBoJack HorsemanGravity Falls) pour se tourner vers un style plus sérieux, détaillé et gothique.

Le niveau où cette inspiration est la plus captivante est l’animation, notamment celle des combats. On retourne à une animation 2D traditionnelle faite à la main, inspirée des films Vampire Hunter D. La gestuelle des personnages est claire, permettant ainsi de créer des scènes de combat fluides, lisibles, bien chorégraphiées et mises en scène. Castlevania nous présente des moments d’animation au dynamisme dingue en reprenant une marque de fabrique des animés : l’impact frame.

« une image laissée en animation très peu de temps pour donner un effet de flash ou d’impact sur le spectateur » Citation de l’animateur Vincent Chansard

Sypha, un personnage féminin badass

La série se paie carrément le luxe d’avoir dans son équipe l’une des références mondiale actuelle des impacts frames, l’animateur français Vincent Chansard. Ce dernier a d’ailleurs fait ses preuves dans l’animation japonaise avec One Piece (arc Wano).

La musique de la série possède aussi un traitement très animé. Elle reprend les thèmes iconiques des jeux et rythme les scènes, finissant de leur donner un aspect épique lors des combats.

 

Focus sur les personnages

Une question rythme les quatre saisons de la série Castlevania : qui sont les véritables monstres, entre les vampires et les humains ?

Dracula, un monstre humain. 

La série nous questionne tout du long sur la nature de ses personnages. Ces derniers font partie des points forts de la série, et plus particulièrement ses antagonistes. Dracula, grand ennemi des jeux et antagoniste des premières saisons, n’est pas traité comme un méchant caricatural. Son histoire fait de lui un personnage tragique avant tout. Il suscite de l’empathie par sa nature plus « humaine » que celle des humains de la série, eux bien plus monstrueux.

« The best villains, in general, are the heroes of their own story [...] Dracula isn't a bad guy, he isn't a villain, he's just a person consumed with darkness. »

Les meilleurs méchants, en général, sont les héros de leur propre histoire [...] Dracula n’est pas une mauvaise personne, ce n’est pas un méchant, c’est juste une personne consumée par les ténèbres

Ce ton dans l’écriture vient du producteur Ady Shankar, qui réitéra ce traitement avec l’excellent antagoniste de la série Devil May Cry, Le lapin blanc (une autre adaptation de jeu vidéo par Netflix).

Sur les quatre saisons, des arcs entiers sont centrés sur l’état ou l’évolution psychologique des personnages. Tout au long de la série, nous suivons l’histoire sous différents angles. Les antagonistes majeurs ont toujours le droit à leur propre point de vue, qui nous permet de voir leur personnalité et de comprendre leur mentalité. Le poids des événements et leurs répercussions sur les héro·ïnes sont également mis au centre de la série. Nous les voyons ainsi dans toute leur humanité, faibles, tristes et brisé·es, mais aussi joyeux·ses, taquin·es et amoureux·ses.

Toutefois, même si ce focus sur les personnages est très intéressant, la série se perd parfois dans l’équilibrage entre ses intrigues passives (où l’on se concentre sur les personnages) et les intrigues actives (où l’histoire avance). 

 

Un voyage épique, complexe, mais inégal

De base, le projet d’adaptation de Castlevania en animation était censé prendre la forme d’un film, non d’une série. Le scénario écrit par le scénariste Warren Ellis prévoyait même une trilogie. C’est la raison pour laquelle la première saison n’est composée que de 3 épisodes. Elle correspond au premier acte du film initialement prévu. Cette saison 1 fait alors plus office de longue introduction que d’une vraie saison à part entière, ne marquant que l’introduction des personnages principaux (Trevor, Sypha, Alucard et Dracula).

Le trio de héro : Trévor Belmont, Sypha Belnades et Alucard

Comme évoqué précédemment, tout au long de ses quatre saisons, la série Castlevania se construit autour de plusieurs points de vue, voire plusieurs intrigues. La première et la deuxième saison tournent autour de l’antagoniste Dracula, montrant tour à tour le point de vue des héro·ïnes et celui de l’antagoniste et de ses alliés. La formule se complexifie à partir de la saison 3. L’histoire commence à éclater en plusieurs intrigues indépendantes les unes des autres — néanmoins toutes sont des conséquences du combat contre Dracula. Ainsi, Castlevania ne traite pas ses différentes intrigues comme des péripéties isolées : c’est un réseau complexe, mais compréhensible, qui souligne le poids et les conséquences des actions des personnages au sein de l’histoire.

Trévor et Sypha
Alucard
Isaac
Hector

La série possède un problème d’équilibrage dans ses intrigues. Toutes ne sont pas égales en matière de contenu. Certaines sont assez légères, comme la saison 2, où l’action est lente : en conséquence, les personnages semblent ne pas faire grand-chose, comme s’il n’y avait pas assez de matière pour une saison entière. Par opposition, l’inverse se produit aussi —  trop de contenu pour une seule saison — avec la saison 3, qui  est très dense. Elle arrive à mettre en place beaucoup de tension et d’enjeux, qui seront seulement en partie résolus lors du final. Le reste devra attendre la saison 4 pour avoir une conclusion, ce qui donne un léger sentiment d’inachevé.

Le retour du trio

La série Castlevania se conclut alors avec sa quatrième saison, dont le but est de conclure les intrigues en cours, rassembler son trio de héros et partir avec un final explosif. Malheureusement, bien que la fin soit effectivement épique, elle est plutôt frustrante. On a une sensation de rassemblement forcé de deux des trois intrigues de la saison, afin de rassembler les protagonistes à un même endroit. Quant à la troisième intrigue, elle finira à la hauteur de ses enjeux, avec parmi les meilleures scènes de la série. Toutefois, à nouveau, la frustration est présente de voir cette intrigue se conclure en milieu, et non en fin de série. À la place, l’ultime antagoniste, bien que spectaculaire, arrive de manière superficielle, pour créer un effet « waouh ». C’est regrettable quand la série s’était distinguée par l’écriture de ses méchant·es.

Carmilla, une antagoniste formidable

Pour conclure, Castlevania est une série d’animation qui a redéfini l’animation américaine des années 2010 en choisissant d’insuffler l’énergie et le dynamisme des animés japonais. Ainsi, nous avons une très bonne série, de qualité cinématographique, aux thématiques matures et sombres, ainsi qu’à l’esthétique détaillée et gothique. Bien qu’elle ait du mal à trouver le bon équilibre entre toutes ses intrigues, cela n’empêchera pas de profiter de l’histoire prenante de la série.

L’univers de Castlevania aura le droit à une nouvelle série : Castlevania Nocturne, une série spin-off se concentrant sur les aventures de Richard Belmont le descendant de Trévor Belmont affrontant la comtesse vampire Erzsebet Báthory lors de la Révolution française en 1792.

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Par Roxane